
Chasse aux sorcières, langue et poing coupés suivis de décapitation pour blasphème, emprisonnement pour lèse-majesté, volée de coups de bâton pour insulte à noble, autodafés, comédiens et philosophes enterrés de nuit, dans la fosse commune … C’était au Moyen-Age mais aussi hier encore, au XVIII°, le siècle des lumières. La barbarie n’est pas si lointaine. Heureusement, il n’y a plus d’horreurs de ce genre au XXI° siècle, se réjouissent les optimistes… Las ! Chasse aux femmes mal voilées en Iran, destruction des Bouddhas en Afghanistan, interdiction des oeuvres profanes en Pologne, pendaison des homosexuels en Iran, lapidation des mêmes en Russie, un opéra de Mozart auto-censuré par crainte des intégristes musulmans… Ca ne rassure pas !
Et en France ? Sohane brûlée vive, Ghofrane lapidée, filles non voilées harcelées et molestées dans le XI°, commandos anti-avortement, procès aux journaux ayant publié des caricatures de Mahomet, procès pour parodie de La Cène … et c’est la partie émergée de l’iceberg ! On ne parlera pas des petites lâchetés, on ne parlera pas des fanatiques politiques, des fanatiques de la bien-pensance, des extrémistes de tout poil qui, procès au poing, cherchent à éteindre, partout, le vent de la liberté de parler, de penser et d’agir.
Si l’on constate, néanmoins, du mieux par rapport aux siècles passés en France, on le doit à trois facteurs liés : d’abord, l’instauration de la République et de son principe d’égalité, qui a supprimé les privilèges exorbitants de la noblesse, « sacrée » et intouchable dans l’Ancien Régime, elle a apporté la liberté d’expression ; ensuite, la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, on ne dira jamais assez à quel point elle a permis à chaque citoyen de critiquer le religion et même de ne pas croire ; liberté ultime, celle de la conscience.
Enfin, les risques encourus par les « esprits libres », au cours des siècles, ont permis aux autres d’avancer et d’avoir la liberté d’action. Depuis Socrate condamné pour impiété et corruption de la jeunesse, Galilée condamné pour héliocentrisme, Giordano Bruno brûlé comme hérétique, Olympe de Gouges, la féministe, guillotinée, Voltaire ou Beaumarchais emprisonnés, Louise Michel déportée, Zola peut-être assassiné… ils sont des milliers, on ne peut les citer tous mais on leur doit cette fabuleuse liberté que nous avons encore, pour le moment.
Alors, se rappeler pourquoi ils ont souffert ou sont morts, reprendre ou continuer leurs luttes contre les obscurantismes, les intolérances, les superstitions, les discriminations, voilà notre devoir, à nous ; nous le leur devons, et même si, obscurs tâcherons que nous sommes, nous ne pouvons nous comparer à ces êtres d’exception, nous devons continuer à porter haut le flambeau de la liberté et de l’insoumission, nous devons chercher, par tous les moyens, à demeurer des esprits libres.
Voilà pourquoi « Riposte Laïque » refuse tout dogmatisme, toute inféodation, toute chapelle. Voilà pourquoi nous ne nous interdisons aucun sujet, voilà pourquoi nous ne parlons pas d’une seule voix sur les sujets de société et sur la politique et que nos articles parfois se répondent ou s’opposent les uns aux autres, voilà pourquoi notre lutte concerne, d’abord, et en priorité, les religions. Nul d’entre nous, qu’il soit athée, agnostique ou croyant, ne se permettra de critiquer la foi en Dieu, elle relève de la liberté de conscience, de l’expérience individuelle ; elle aide, éclaire ou illumine des millions de personnes dans le monde et est respectable. Par contre, la religion, érigée à l’état de dogme, qui revêt le masque des obligations, des interdits et de la discrimination sexuelle, qui se répand en anathèmes, voire en condamnations à mort, ne peut trouver grâce à nos yeux. La religion est, toujours, un pouvoir à côté du politique, un pouvoir qui veut guider et contraindre les consciences.
Ce n’est donc pas un hasard si Alliot-Marie, comme Sarkozy ou Gaudin, comme Aubry ou Strauss-Kahn, sont très tolérants et même bienveillants à l’égard des demandes des religieux : ils seraient débarrassés de bien des soucis si la religion retrouvait son rôle de gangue, si les prêtres, pasteurs ou imams avaient autorité absolue sur leurs ouailles et pouvaient, comme autrefois, les convaincre que leur sort et la société sont justes, que les pauvres seront les premiers dans l’au-delà et, surtout, qu’il faut s’oublier soi-même au profit du père, du patron, de l’actionnaire ou du petit chinois qui travaille pour un salaire de misère.
Non, Mesdames et Messieurs, c’est trop facile de se défiler. C’est trop facile de créer une société qui sacrifie au veau d’or, se prosterne dans les temples de la consommation que sont les hypermarchés, se mire dans les émissions débiles de télé-réalité et de demander à l’opium du peuple de revenir sur le devant de la scène. Mesdames et Messieurs les politiques, vous avez à proposer des projets de société qui respectent l’homme, qui lui permettent de trouver un équilibre entre son travail et sa vie privée, vous n’avez pas à rejeter sur d’autres la tâche de compenser vos erreurs/errances.
Et les esprits libres de ce temps sont là pour le rappeler à chacun, pour aider chacun à dire non.
On a tous le droit et le devoir de dire non. Non à la discrimination féminine, non à l’entrisme religieux, non aux ghettos, non aux inégalités, non à la censure, non aux totalitarismes, non à ce monde qui veut faire de l’homme un esclave juste capable de produire, consommer, s’endetter, produire, consommer, s’endetter …
Certes, il n’est pas facile, même en Europe, même en 2007, d’oser. Les rares esprits libres publics qui nous restent, comme Rushdie ou Redecker en sont/ont été le triste exemple. Les anonymes qui se battent contre le voile dans leur gîte ou dans les sorties scolaires de leur école en font l’amère expérience, comme l’ancien recteur de Lyon qui avait émis un avis défavorable à la création d’un collège musulman et a été déplacé….
Nous sommes là pour vous faire connaître ces iniquités, ces scandales, pour les dénoncer, pour que, citoyens avertis, vous ne soyez pas leurrés par les omissions ou les mensonges médiatiques, ni par les arguties des politiques, pour que vous et nous, en toute humilité, nous résistions obstinément à la standardisation en cours et que nous demeurions « des esprits libres ».