J'ai écrit à la direction de Carrefour

Madame, Monsieur,
J’ai vu sur internet un reportage vidéo qui m’a stupéfait et profondément choqué (1). Il s’agit d’un groupe de militants prônant le boycott des produits israëliens qui ont récemment envahi votre magasin d’Aulnay sous Bois, s’emparant des marchandises en question pour, semble-t-il, les mettre à la poubelle.
Ces personnes ont tout-à-fait le droit de boycotter les produits israëliens, mais je ne pense pas qu’elles aient celui de recourir à des méthodes d’intimidation aussi musclées face à votre clientèle. Ces méthodes vont jusqu’à la menace de mort à peine voilée, puisque l’on voit l’une de ces personnes renverser un flacon de cosmétique en déclarant, je cite MOT POUR MOT : « Et c’est tout ceux qui soutiennent Israël, regardez ce qui vous attend ».
Ce qui me choque le plus dans cette vidéo est que l’on ne voit aucun signe de réaction de votre part, que ce soit l’intervention de votre service de sécurité ou celle de la police.
Avez-vous l’intention de porter plainte contre ce groupe ?
Quelles mesures comptez-vous mettre en place pour assurer ma sécurité en tant que client lorsque je ferai mes achats dans l’un de vos magasins ?
Par ailleurs, sans rentrer sur le fond de l’argumentaire de ses personnes, mon souci n’étant pas de restreindre leur liberté de s’exprimer dans le calme, mais que vous ne tolériez pas dans votre enceinte, où vous accueillez du public, des comportements menaçants et à la limite de la violence, je me permettrais quelques remarques.
Tout d’abord, sur la question, je cite, des « produits israëliens cultivés sur des terres palestiniennes ». Pour ne donner qu’un seul exemple, lorsqu’Israël a restitué la bande de Gaza à l’autorité palestinienne il y a peu d’années, la restitution incluait les fameuses serres de Gaza, qui avaient alimenté en fruits et légumes un pays de la taille de la Roumanie pendant des années. Peu après la restitution, l’autorité palestinienne implorait Israël de lui envoyer du personnel compétent pour faire fonctionner ces serres. Les uns rendront responsables Israël du manque de formation de la jeunesse palestinienne, les autres en rendront responsables les palestiniens eux-mêmes. Quoi qu’il en soit, voilà ce qu’il en est des produits israëliens que vous vendez, soi-disant « cultivés sur des terres palestiniennes ».
D’autre part, une dame compare ce « boycott » à celui, autrefois, des produits sud-africains. Outre que la comparaison entre l’apartheid en Afrique du Sud et le conflit israëlo-palestinien me paraît, pour le moins, hasardeuse, les militants d’alors contre l’apartheid n’ont jamais, à ma connaissance, eu recours à des opérations commando de ce type, ni importé un conflit étranger sur notre sol, avec des déclarations telles que, je cite encore : « On est chez nous ici, en France ». Effectivement, nous sommes ici en France et non en Israël ou en Palestine.
Enfin, s’il faut boycotter des produits pour des causes humanitaires ou considérées comme telles, la liste est longue, de pays perpétuant des atrocités autrement plus abominables que celles d’Israël, de la Chine à l’Iran. Peut-être savez-vous, par exemple, que les pistaches vendues dans vos rayons et ceux de vos concurrents grossissent, entre autres produits du pillage organisé du pays et de sa population, la fortune personnelle évaluée à 15 milliards de dollars de Monsieur Rafsanjani, maître occulte de la République Islamique d’Iran, pays qui détient le record du monde du nombre d’exécutions par rapport au nombre d’habitants, par pendaison, lapidation et… précipitation du haut d’une falaise pour les homosexuels… y compris de personnes mineures ? Je n’achète plus de pistaches, mais je ne vais pas pour autant importuner (le mot est faible) les autres clients autour de moi, ni dévaster vos étalages.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.
M. P.
Lecteur souhaitant demeurer anonyme, pour des raisons professionnelles.
http://www.bivouac-id.com/2009/03/19/video-les-fascistes-verts-font-une-descente-au-carrefour/