Bien sûr qu'il ne faut pas fuir le débat avec Dieudonné !

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Dans les années 1980, lors de la montée du Front national, une certaine gauche avait trouvé le remède miracle, pour lutter contre sa progression : refuser tout contact, tout débat, avec Jean-Marie Le Pen. Cette stratégie, bien peu courageuse, se traduisait parfois par des situations un peu ridicules. Il suffisait que Jean-Marie Le Pen arrive sur un plateau de télévision pour que Krivine se lève et entraîne tout le monde vers la sortie. Cette attitude de refus du débat n’a jamais montré de brillants résultats, puisque le Front national continuait de progresser. Mais à l’époque, quiconque osait transgresser l’interdit se voyait accuser de banaliser le FN, et d’en faire un parti traditionnel.
Et puis Bernard Tapie, qui n’était pas issu du sérail politicien, a fait fi de ces beaux discours moralisateurs, et a affronté, en 1986, le leader du Front national, de manière très virile. Certes, cela n’a pas arrêté la progression électorale du parti de Jean-Marie Le Pen, mais cela a levé un tabou, et, ensuite, des personnalités se sont permis d’affronter le fondateur du FN, dans des débats télévisés. Et la démocratie ne s’en est pas plus mal portée.
Ce rappel pour dire qu’aujourd’hui, plus personne n’ose demander l’interdiction du Front national (même Mélenchon n’en parle plus) et que plus personne ne joue la pureté révolutionnaire en refusant le débat avec Marine Le Pen. Besancenot ne se lève pas quand la nouvelle leader du FN pénètre sur un plateau, et même le chef de Parti de gauche a accepté de la rencontrer, en débat, le 14 février prochain, sur France 2. Et là encore, la démocratie ne s’en portera pas plus mal.
On a dès lors beaucoup de mal à comprendre la logique de « Parti de gauche », ou d’un Delanoé, qui ont demandé l’interdiction des « Assises sur l’islamisation de nos pays », le 18 décembre, au prétexte – mensonger – qu’elles auraient été racistes et auraient rassemblé des gens d’extrême-droite, alors qu’ils acceptent de débattre sur les plateaux de télévision avec une personne qu’ils continuent d’insulter, par ailleurs, dans leurs communiqués, la qualifiant de « raciste », « fasciste » ou « d’extrême droite ». Mais à chacun ses contradictions, les assises du 18 décembre se sont tenues, personne n’y a entendu le moindre propos raciste, et la démocratie ne s’en est pas portée plus mal.
Le nouveau personnage infréquentable, sorte de Jean-Marie Le Pen des années 2010, paraît être Dieudonné. Certes, son sketch de chez Fogiel n’était pas extraordinaire, c’est le moins qu’on puisse dire. Autour de lui, gravitent des gens plutôt inquiétants. Depuis, dans ses spectacles, l’obsession presque pathologique du complot juif permet les propos les plus provocateurs, et, pour singer les bien-pensants, « rappelle les heures les plus sombres de notre Histoire ». Dieudonné n’est peut-être pas un salaud, mais il tient les discours proche de celui de tous les salauds antisémites des années 1930.

Mais cela en fait-il un pestiféré, à qui il faut casser la gueule, devant qui il faut se pincer le nez, et changer de trottoir, pour ne pas lui serrer la main ? Est-ce en lui refusant la parole, en le diabolisant, qu’on le combat efficacement, lui et son discours ? Ne véhicule-t-on pas l’idée, plutôt, que si on l’empêche de s’exprimer, c’est peut-être parce qu’il a raison, et qu’un lobby dirige la France ?
Lors de la remise du prix de la Liberté d’expression, organisée par le site « Enquête et Débats », l’humoriste – que les organisateurs avaient sélectionné parmi les vingt postulants – a surpris son monde, en venant, de manière improvisée, assister à la cérémonie. Nous avons vu trois sortes de réaction. Eric Zemmour lui a serré la main, sans la moindre hésitation, tout en ironisant sur le fait qu’il l’avait nettement distancé au classement. D’autres amis ont préféré quitter la salle immédiatement, pour ne pas être vus en sa compagnie, ou pour lui signifier leur désaccord total avec ses discours. Quant à Christine Tasin, quand elle a eu la parole, elle a insisté sur son combat contre l’islamisation de la France. Evidemment, Dieudonné l’a interrompue en lui disant que pour lui, cela ne constituait pas un problème, et que le danger était ailleurs (on devine où il veut en venir). Mais il a ajouté qu’il était prêt à en discuter, et Christine a pris la balle au bond. Conclusion : dans les heures qui vont suivre, Christine Tasin débattra, dans la transparence, avec Dieudonné. La démocratie ne s’en portera pas plus mal !
Il n’y a, de notre part, aucune volonté de transformer ce débat en jeu du cirque. Christine y viendra pour défendre ses convictions, répondre à Dieudonné, et avancer nos arguments, et des faits, démontrant la réalité de l’islamisation de notre pays, et les dangers que cela occasionne. Seuls, aujourd’hui, le phénomène « Internet », et des sites comme « Enquête et Débats » autorisent de telles confrontations. Les deux intervenants auront une heure pour s’exprimer, sans s’interrompre, et à eux de gérer leur temps. Cela nous paraît autrement plus intéressant que ces débats télévisés de grande audience, où personne ne peut dire trois phrases sans être interrompu, coupé, interpellé !
Cette culture du débat, nous la revendiquons, même si nous craignons parfois de véritables embuscades. Mais nous n’en refusons aucun, parce que nous avons confiance dans la cohérence de notre discours. Anne Zelensky, féministe historique, qui fut de tous les combats sur l’IVG, débattra, dans les jours qui viennent, avec Philippe Isnard, cet enseignant suspendu pour avoir montré des images à ses élèves sur l’avortement, le liant à un assassinat. Pascal Hilout accepte toutes les invitations, toutes les confrontations, et son discours reste le même. Que dire de Pierre Cassen, capable de débattre sur Radio Courtoisie, Radio Libertaire, au Local et ailleurs, avec le même discours, laïque, social, républicain et féministe, quel que soit l’interlocuteur ? Dans cet esprit, il a accepté un débat avec le vice-président du CFCM, Chems Hafiz, qui, après avoir dit « oui » dans un premier temps, l’a fait différé, espérons momentanément… Et il interviendra, lundi 7 février, à Paris, à 19 h 30, à l’invitation du Parti des Libertés, présidé par Serge Federbusch, sur le thème « La laïcité est-elle en danger ? ».
Et nos autres débatteurs, Maurice Vidal, Radu Stoenescu, Alain Rubin, Robert Albarèdes, sont dans cet état d’esprit.
Et là encore, la démocratie ne s’en porte pas plus mal…
Cyrano