
Après les galipettes sexuelles de DSK, candidat favori du Parti socialiste et des sondages pour qui la primaire était acquise d’avance, voilà qu’un autre tsunami s’abat sur le PS.
Jean-Noël Guérini, sénateur et président du conseil général des Bouches-du-Rhône, homme fort du parti dans ce département depuis des années, a été mis en examen jeudi dernier pour « association de malfaiteurs, trafic d’influence, prise illégale d’intérêts et complicité d’obstacle à la manifestation de la vérité ». Des accusations extrêmement lourdes, un véritable boulet pour les candidats à la primaire socialiste et plus généralement pour toute la gauche.
En effet, il y a belle lurette qu’à Marseille, on connaît le « système Guérini », digne héritier du « système Defferre ». Les journalistes locaux ont deux expressions pour le résumer :
– Le chéquier et le revolver ;
– BAC : banditisme, affairisme, clientélisme.
Et les trois principaux candidats à la primaire socialiste ne l’ignoraient pas, mais fermaient les yeux car les « Bouches-du-Rhône », c’est une grosse « fédé » (6500 adhérents déclarés…) qu’il vaut mieux avoir dans son écurie même si elle sent mauvais.
C’est ainsi que François Hollande n’a pas eu un mot, une mesure, une action pour faire cesser ces pratiques politico-mafieuses pendant tout le temps qu’il était premier secrétaire du PS.
C’est ainsi que Ségolène Royal a passé un pacte avec Guérini lors des dernières élections internes du parti, avant que Guérini ne retourne sa veste et passe avec armes et bagages dans le camp de Martine Aubry. Des sections entières du PS 13 devenaient « aubrystes » du jour au lendemain. Comme c’est étrange…
Mais la plus hypocrite dans toute cette affaire, c’est bien la maire de Lille. Elle aussi a joué le « donnant-donnant » avec Guérini : on ne fait pas de vague avant les primaires, en échange d’un vote massif de la fédération pour la candidature Aubry : « Touche pas à mon pote Nono, et je soutiendrai ma pote Martine ! », écrivions-nous.
C’est ainsi que Martine Aubry a prétendu ne pas recevoir le rapport que lui a envoyé Arnaud Montebourg. Rapport accablant : « le système de pression féodal reposant sur l’intimidation et la peur », « les dérives les plus graves dans l’usage de l’argent public », « les pressions et les menaces sur les camarades », les finances publiques utilisées « pour faire pression sur les élus socialistes afin de s’assurer de leur soutien sans faille – pour ne pas dire leur docilité – quand il ne s’agit pas de leur silence », « l’utilisation des moyens publics retirés ou attribués au gré des humeurs arbitraires du président », etc.
Quand ce rapport a paru dans la presse quelques mois plus tard, Martine Aubry a prétendu qu’il était vide. Finalement elle se décide à nommer une commission d’enquête qui minimisera totalement les faits : il y a quelques « dysfonctionnements » au sein de la fédé, et il faut y remédier, mais rien de grave. Aucune accusation contre les Guérini, faut le faire ! Ce « rapport » de la commission, mielleux et faux-cul, fut voté à l’unanimité de la direction du PS, sauf une voix : celle de Montebourg, qui saura s’en souvenir le moment venu.
Quant à l’affaire judiciaire, Martine Aubry se cache derrière le secret de l’instruction pour dire que c’est « une affaire privée » (sic !) alors que le rapport Montebourg expliquait en long et en large l’utilisation abusive de l’argent et des moyens publics du Conseil général.
Après la mise en examen, Martine Aubry continue de donner dans le service minimum, et ne demande à Jean-Noël Guérini que de se mettre « en congé du parti » (ce que l’intéressé a fait spontanément). Rien sur le fait qu’il reste président du Conseil général, élu par une majorité socialiste. Aucune condamnation du « système Guérini » !
Elle refusera même de répondre à une question de BFMTV, mettant fin de manière discourtoise à l’interview :
http://www.wat.tv/video/aubry-claque-porte-lors-itw-44kob_324ad_.html
Même son de cloche modérée chez Benoît Hamon, porte-parole du PS, qui se contente de la décision de Guérini de se mettre en congé temporaire du PS.
Harlem Désir, le premier secrétaire par intérim du PS, fait mine de plus de fermeté et demande la démission de Guérini du Conseil général, jugeant les faits fondant la mise en examen « d’une extrême gravité ».
Il est curieux que ce soit Harlem Désir, ancien président de SOS-Racisme, qui se montre aussi ferme. En effet, comme le rappelle Wikipedia, « De novembre 1986 à octobre 1987, alors qu’il est président de SOS Racisme, il est également salarié par l’« Association régionale pour la formation et l’éducation des migrants », basée à Lille en tant que « formateur permanent » et il perçoit pour cet emploi fictif, un salaire mensuel net 8 900 francs. C
ela lui vaut d’être condamné, le 17 décembre 1998, à 18 mois de prison avec sursis et 30 000 francs d’amende pour recel d’abus de biens sociaux. Harlem Désir aurait également bénéficié de la clémence de François Mitterrand : une amnistie concernant une dette de 80 000 francs au Trésor public, relative à des amendes de stationnement (décision de justice du 9 mai 1992) alors qu’il était président de SOS Racisme. »
C’est donc la Charité qui se moque de l’hôpital !
Arnaud Montebourg, tant décrit par ses camarades de la direction du PS comme le vilain canard, boit du petit lait et propose que les conseillers généraux socialistes des Bouches-du-Rhône votent la destitution de leur président.
Cette affaire ne va pas arranger l’image du Parti socialiste et des candidats à la primaire. Ni ses relations avec ses partenaires de gauche. Eva Joly, la candidate d’EELV à la présidentielle, se dit en « lutte pour que Marseille ne devienne pas Naples » et que « l’éco-mafia ne puisse pas prospérer », faisant allusion au fait que le scandale Guérini touche surtout des affaires de ramassage d’ordures. On attend aussi la réaction de Karim Zéribi, porte-parole et farouche défenseur de Guérini aux dernières municipales, avant de virer « vert » quand ça commençait à sentir mauvais.
[dailymotion]http://www.dailymotion.com/video/x326q0_karim-zeribi-porte-parole-de-jean-n_news[/dailymotion]
http://www.dailymotion.com/video/x326q0_karim-zeribi-porte-parole-de-jean-n_news
Quant au « Front de gauche », il sera bien embêté s’il tentait de remuer cette poussière sous le tapis puisque des élus communistes sont également impliqués voire mis en examen dans l’« affaire Guérini ». Elus qui n’ont pas été exclus de leur parti et de leurs mandats, et qui n’ont pas donné lieu à une quelconque réaction du « camarade » Mélenchon.
« Nono » Guérini lui aussi tient bon et refuse de démissionner de la présidence du Conseil général. Même si quelques voix socialistes locale se lèvent timidement sous l’étiquette d’un « collectif Renouveau PS 13 », la plupart des élus et responsables du département savent ce qu’ils « doivent » à « Nono » qui pourrait bien balancer des noms…
Mais le « système Guérini » n’est pas le seul en cause. Nous avions déjà évoqué le système politico-maffieux du Pas-de-Calais, parfaitement illustré par les « affaires » d’Hénin-Beaumont. Et le même jeudi où Guérini est mis en examen, un autre élu socialiste l’est aussi. Il s’agit du maire PS de l’Haÿ-les-Roses et candidat aux sénatoriales dans le Val-de-Marne, Patrick Sève, inculpé pour « octroi d’avantages injustifiés et soustraction de fonds publics dans une enquête sur les marchés publics de sa ville. »
Et on pourrait multiplier les exemples…
Le Parti socialiste a abandonné toute morale politique, et à deux niveaux. Au niveau local, le clientélisme, les marchés publics et autres affaires ; au niveau national, on « couvre » tout ça sans aucun scrupule le plus possible.
Dans un précédent édito, je me demandais si les lecteurs de Riposte Laïque doivent voter à la primaire socialiste, et dans ce cas pour qui ? Certainement pas pour le trio Hollande-Aubry-Royal. Seul Montebourg sort du lot, non seulement pour son courage dans l’affaire Guérini à l’opposé de toute la direction du PS, mais aussi pour son concept de « démondialisation ». Encore faut-il qu’il aille jusqu’au bout de sa logique…
Quant à Manuel Valls, il souffle aussi le chaud et le froid, et on se rappellera qu’il s’oppose fermement à l’abandon du droit du sol et est partisan du financement public des mosquées.
Le dernier candidat est Jean-Michel Baylet, président du Parti radical de gauche. De tous les candidats, c’est celui qui défend le mieux la laïcité. Mais on apprend qu’il est mis en examen depuis 2009 pour « infraction au code des marchés publics ». Tiens, lui aussi ?
Jaurès, réveille-toi, ils sont devenus fous !